Enregistré en 1977 (sorti la même année) au studio Hansa-by-the-Wall de Berlin-Ouest, produit par David Bowie, Lust For Life est le second album solo d'Iggy Pop, et son second chef d'oeuvre consécutif après The Idiot datant de la même année (et enregistré en 1976). Chose amusante : The Idiot a été enregistré en France (Château d'Hérouville) en 1976, et Bowie y a enregistré, la même année, son Low. En 1977, Bowie enregistre, à Hansa-by-the-Wall de Berlin, son album "Heroes" et assiste Iggy pour Lust For Life. Encore une fois, on peut supposer que les deux disques ont été faits simultanément ! C'était pour l'anecdote à la con du jeudi. En dehors de ça, Lust For Life, avec sa pochette en noir & blanc montrant un Iggy Pop souriant de toutes ses dents (et le regard pétillant, bien qu'un petit peu sournois) est tout simplement un joyau.

The Idiot était technocratique, glacial, glauque et industriel (Mass Production). Cold-wave. Lust For Life, lui, est nettement plus rock et accessible. Il contient deux immenses tubes de l'Iguane : Lust For Life (et son intro de batterie cultissime, la voix hargneuse et cynique de Pop) et The Passenger, bel hommage de Pop et Bowie envers Jim Morrison. Et mélodie cultissime. Personnellement, j'ai toujours trouvé que le groupe français Cookie Dingler s'en était inspiré pour son Femme Libérée de merde des années 80. Vous trouvez pas que c'est flagrant ? Je parle de la mélodie, pas des paroles ou de la manière de chanter. Bon, fin de la parenthèse débile (et pourtant...). L'album a peut-être été enregistré avec les mêmes musiciens que pour The Idiot. Car sur la pochette de The Idiot, il n'était pas fait mention des musiciens. Ici, si : Ricky Gardiner (guitare), Hunt et Tony Sales (basse pour l'un, batterie pour l'autre ; les deux formeront Tin Machine avec Bowie dans les 90's), Carlos Alomar (guitare), Bowie himself (piano) et Iggy au chant, on s'en serait fortement douté.

L'album offre deux tubes, mais les 7 autres titres n'en sont pas moins fulgurants : enfin, Sixteen est un peu trop courte, mais quand même sympa. Some Weird Sin est bien barré et énergique, Success est assez amusante et sortira en face B du single The Passenger. Neighborhood Threat sera reprise (mal, oh, très mal) par Bowie en 1984 sur Tonight, et est, ici, aussi efficace que très rock. Son de guitare d'enfer. Le reste de l'album est plus calme, mais pas apaisé : Turn Blue est une chanson de 7 minutes, un blues terminal purement iggyien dans lequel l'Iguane répête Oooooh, mama...I shot myself down ("je me suis tiré dessus"). Blues terminal, en effet, car le Iggy s'imagine en train de calancher, de se retrouver devant le Seigneur (Jesus ? This is Iggy). Glauque et incroyable montée en puissance. La fin, avec les harmonies vocales de Bowie, est superbe. Tonight est une ballade magnifique que Bowie reprendra (mal, oh, très mal) sur Tonight en 1984, en duo avec (aargh) Tina Turner. Là, c'est Iggy seul, avec la voix de Bowie (qui co-signe quasiment tout l'album) en arrière-plan. La chanson, dont l'intro est magnifique, parle d'une jeune femme, petite amie du chanteur, qui meurt dans ses bras (I saw my baby, she was turning blue, I knew that soon her young life was through). La chanson est poignante, son de guitare magnifique, arrangements superbes, sans doute le sommet du disque. Enfin, comment ne pas parler de Fall In Love With Me, chanson finale de plus de 6 minutes, envoûtante, hypnotique, assez barge mais en même temps tellement sincère, chanson d'amour à la Iggy Pop ? Tout simplement puissant. Lust For Life, personne n'en doutera, est de la race des chef d'oeuvres.